Comme une large majorité de mes compatriotes, je ne reconnais aucune légitimité juridique à votre pouvoir tyrannique, despotique et dépourvu de toute valeur morale. Bien que trompé sur vos véritables desseins, le peuple a donné par sa participation une légitimité à la révolution. Cette légitimité a été perdue par l’instauration et la poursuite dans la terreur et la corruption du régime fondé sur le magistère du guide suprême religieux.
La légitimité et la crédibilité d’un régime politique ne s’apprécie pas qu’à la seule aune du vote populaire, mais également à celle de sa capacité à assurer le bien être de son peuple et d’œuvrer pour l’intérêt national dans le respect des droits de l’homme. Un pouvoir qui ne puisse satisfaire cette double exigence est aussi digne de confiance qu’un gouvernement d’occupation, c’est hélas, Monsieur Khamenei, le cas de l’Iran de ces trente dernières années.
Depuis presque trente ans votre politique d’intimidation et de terreur a réduit à néant la liberté d’expression et de vote du peuple iranien. De notre vaste pays, vous n’avez fait qu’une large prison sans presse libre ni partis politiques indépendants pouvant être les portes paroles et défenseurs des différentes couches de la société.
Depuis son instauration, votre régime abuse toutes les couches de la société iranienne dans ses droits les plus élémentaires :
Je pense à nos travailleurs qui ont juste le droit de se taire mais jamais celui de pouvoir exprimer leurs revendications en se constituant en syndicats ;
Je pense à la bravoure de nos millions d’étudiants, ces portes paroles vigilants du peuple d’Iran, qui chaque fois qu’ils ont exprimé leur soif de démocratie ou défendu les intérêts de la nation n’ont reçu comme seules réponses que la prison, la torture ou la mort.
Je pense aux femmes d’Iran dont vous avez fait des citoyennes de seconde zone. Ces mères et filles démunies de notre patrie que votre régime maintient dans sa forteresse moyenâgeuse et qui luttent pour briser les chaines de la honte.
Je pense à ces religieux vertueux, réprimés pour avoir exprimé leur opposition et dénoncé que votre régime porte atteinte à la foi religieuse d’une large partie de la population.
De plus, vous avez fait des élections du Parlement une vulgaire mascarade truquée, un outil honteux dans le seul but de tromper notre peuple. Sans l’existence de partis politiques et de médias libres et d’une justice indépendante, vos « élections » sont comparables à celles qui avaient cours en ex URSS.
Monsieur Khamenei, votre inaptitude chronique ainsi que celle de vos prédécesseurs à satisfaire les besoins économiques minimaux du peuple d’Iran accentue l’illégitimité de votre régime despotique.
Je pense à nos ressources, à nos talents et à la place que l’Iran devrait occuper aujourd’hui dans le monde. Votre incompétence devient coupable alors que les revenus pétroliers de l’Iran de ces trente dernières années ont été nettement supérieurs que dans le passé. Votre théocratie prive non seulement le peuple iranien de ses droits et libertés fondamentaux, mais après avoir hérité d’un Etat riche, prospère et servant de modèle de développement à toute la région, a amené notre pays au désastre et à la faillite économique, à l’hyperinflation et au chômage massif. Il n’existe, de par le monde, qu’une poignée de régimes ayant privé leurs peuples aussi bien des droits humains fondamentaux que conduit leurs pays à la faillite économique. Il n’est donc pas étonnant de compter parmi vos rares pays alliés la Syrie, le Soudan ou la Corée du Nord.
Dés le début de votre prise de pouvoir, vous avez insulté et humilié les grands héros de notre histoire, démontrant ainsi votre animosité à l’égard de notre identité et de notre culture, qui sont les véritables fondements des liens qui unissent notre peuple depuis des milliers d’années. Vous avez opprimé nos différentes communautés ethniques et minorités religieuses, affaiblissant ainsi notre coexistence pacifique et notre solidarité nationale. Dans le même esprit, dés le commencement de votre régime, vous avez œuvré à la destruction de notre puissante armée et exécuté ses chefs donnant au gouvernement irakien l’opportunité d’attaquer notre chère patrie.
Dans le but de dominer l’Irak et d’atteindre Jérusalem, vous avez prolongé la guerre en sacrifiant la vie des centaines de milliers de jeunes et d’adolescents et dilapidé d’énormes richesses. Cette guerre, vous l’avez tant prolongé que notre Iran, bien qu’agressé à l’origine, a été désigné co-agresseur par la communauté international et les Nations-Unies. En violant l’un des plus anciens et incontestables principes de droit international, avec l’occupation de l’ambassade des Etats-Unis et la prise d’otage de ses diplomates et en poussant ce pays à rompre ses relations avec l’Iran, vous avez fait supporter, à notre peuple, un coût économique et politique sans précédent.
Monsieur Khamenei, le non respect des droits et libertés fondamentaux du peuple iranien ainsi que l’accroissement des difficultés économiques sont intolérables pour notre peuple, mais votre politique qui consiste à générer des crises dans l’ensemble de la région, menace aujourd’hui la sécurité et l’intégrité territoriale de notre patrie.
Il est établi que dans les années précédant votre conquête du pouvoir, vous et vos complices avez théorisé et planifié l’utilisation de la religion comme un levier pour intervenir dans les affaires des pays voisins de l’Iran. D’ailleurs, dans le préambule de la Constitution de la République islamique, cette volonté est clairement affirmée.
Par votre ingérence direct ou indirect dans les affaires des voisins de l’Iran, comme l’Irak, le Liban, la Palestine et l’Afghanistan ; et par votre soutien politique, financier et militaire, aux mouvements les plus extrémistes ennemis de la liberté et de la coexistence pacifique, vous avez associé le nom de l’Iran à ces organisations criminelles et terroristes. La conséquence de votre politique est que l’Iran est mis aujourd’hui au banc des nations. Si certains esprits naïfs dans le monde n’avaient pas encore réalisé le véritable rôle direct de votre régime dans les troubles et tueries effectués dans les pays voisins de l’Iran, les aveux prononcé récemment par votre vieux complice, Monsieur Mohammad Khatami, ne laissent plus aucun doute pour personne.
Cependant, en provoquant la communauté internationale et en recherchant la confrontation permanente, vous tentez d’atteindre votre objectif principal qui est de détourner l’opinion publique iranienne. En effet, sous le prétexte de posséder l’énergie nucléaire pour un usage civil, vous recherchez en réalité à obtenir des armes de destruction massive afin que l’Iran fasse une nouvelle fois l’objet de menaces et d’attaques. A cause de votre politique, notre patrie fait face à une crise extrêmement dangereuse et sans précédent. Une aventure clairement rejetée par notre peuple.
Le peuple avisé et clairvoyant d’Iran ne perçoit son intérêt, ni dans vos intervention armées et sournoise en Irak, au Liban et en Palestine, ni dans votre haine à l’égard des sociétés libres et développés du monde, ni dans votre course folle pour l’obtention de l’arme nucléaire. La nation iranienne n’ignore pas que bien avant la Révolution notre pays avait la compétence nécessaire et le droit d’obtenir l’énergie nucléaire et ce avec le soutien et la collaboration de la communauté internationale ; car aucun pays ne doutait des objectifs et de la politique de notre gouvernement de l’époque. Mais, avec votre politique agressive et provocante, vous avez anéantie cette atmosphère de confiance, et vous avez poussé la majorité des Etats du monde à prendre position contre l’Iran. Ainsi, vous cherchez à obtenir de nouveaux prétextes pour réprimer encore davantage le peuple d’Iran.
Monsieur Khamenei, bien qu’au début de cette lettre j’ai affirmé qu’aux yeux de mes compatriotes votre régime soit dépourvu de toute légitimité, cependant mon amour de la patrie et mon inquiétude à l’égard du destin de mes compatriotes m’obligent à vous avertir que vous et vos confrères êtes les principaux responsables de toute atteinte qui serait portée, par quelque force que ce soit, à l’intégrité et à la souveraineté de l’Iran.
Monsieur Khamenei je vous mets en garde; si une telle catastrophe se produit, votre destin sera comparable à celles de ces tyrans qui ces dernières années ont été traduit devant le Tribunal Pénal International pour crime contre l’humanité. Si vous ne tirez aucune leçon du destin de ces derniers, si la liberté et le bien être des iraniens n’occupe aucune place dans votre cœur et dans votre esprit, au moins préoccupez vous de l’avenir de cette Terre qui vous a vu naître.
Aujourd’hui, vous pouvez encore solliciter le pardon de la nation, mais soyez averti que si vous n’acceptez pas les souhaits du peuple alors sa colère brisera votre pouvoir pharaonique et vous devrez répondre de trente ans de malheurs et d’injustices.
Que Dieu protège l’Iran.
Reza Pahlavi