Le Figaro – Pensez-vous que dans votre pays, l’Iran, le pouvoir des mollahs touche à sa fin ?
Reza Pahlavi – Il est clair qu’aujourd’hui le régime en Iran va vers une impasse, à l’image de l’Union soviétique de la fin des années 80.
Quand vous parlez du régime, vous ne faites pas de différence entre les « modéré » du président Khatami et les « radicaux » de l’ayatollah Khamenei…
Non, je ne fais pas de différence. Car les iraniens ont compris aujourd’hui que le système ne pouvait pas être réformé en l’état. Une théocratie fondée sur la loi coranique n’est pas compatible avec la démocratie. C’est pourquoi la question de la laïcité est essentielle dans mon pays. Je pense que la séparation de l’Etat et du clergé est une condition indispensable à l’établissement de tout régime démocratique.
Pensez-vous que les iraniens seraient prêts à rétablir la monarchie, que vous représentez en tant qu’héritier au trône ?
Avant d’envisager la forme finale que prendra notre démocratie future, il faut que les iraniens se mettent d’accord sur les principes fondamentaux : séparation de l’Etat et du clergé, incorporation dans la Constitution iranienne de tous les articles de la Déclaration universelle des droits de l’homme, gouvernement du peuple, par le peuple, et pour le peuple.
Personnellement, seriez-vous favorable à une monarchie constitutionnelle de type espagnol ?
Comme je l’ai dit dans mon livre, Winds of Change (Reignery éditeur), je préconise un référendum national à travers lequel les Iraniens feront leur choix final. Ce sera aux Iraniens de décider s’ils préfèrent une république ou une monarchie constitutionnelle. Il va sans dire que si les Iraniens se prononçaient pour une monarchie constitutionnelle, nous reprendrions des modèles connus (Espagne, Suède, Royaume-Uni, Japon, etc.), dans lequel le monarque règne mais ne gouverne pas. J’aimerais simplement souligner qu’aujourd’hui ma seule préoccupation, la seule tâche politique que je me suis assignée, n’est pas de chercher à monter sur le trône, mais d’aider l’Iran à se démocratiser.
Etes-vous favorable dans l’état actuel des choses, à une invasion américaine de l’Irak ?
Dans l’immédiat non. Je pense que la guerre ne devrait être qu’un dernier recours, une fois tous les autres moyens épuisés.
A quel moyen faites-vous allusion ?
Si les inspecteurs de l’ONU demandent davantage de temps pour achever leur travail, je pense qu’il faut le leur donner. Je salue par ailleurs l’initiative saoudienne qui cherche à obtenir un départ pacifique de Saddam Hussein, afin d’éviter toute effusion de sang sur le sol Irakien. Je pense que toutes les phases d’un processus onusien normal – qui bien sûr ne soit pas infini – doivent être respectées dans cette affaire.
Est-ce dire que vous approuvez la position de la France, laquelle réclame une seconde résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies pour autoriser une invasion militaire de l’Irak ?
Je pense que la position française, qui est partagée par une grande partie des pays membres de l’ONU, est raisonnable. La France cherche à épuiser tous les moyens avant la guerre. De plus, la Charte des Nations Unies exige clairement un vote du Conseil de sécurité avant tout recours à la force.
Pensez-vous qu’un proconsulat militaire américain en Irak de 18 mois, tel qu’il a été dessiné par plusieurs stratèges du Pentagone, serait viable ?
Vous-vous placez dans l’hypothèse d’un remplacement de Saddam Hussein par l’opposition irakienne. Si une présence militaire anglo-américaine, limitée dans le temps, permet la stabilisation du pays, je ne suis pas contre. Mais l’important est que ce soient des irakiens, représentant toutes les factions de l’opposition irakienne actuelle qui gouvernent au plus tôt leur pays.